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«L’Arménie et la population arménienne

du Haut Karabakh ont plus que jamais

besoin de notre solidarité»

Le Figaro

FIGAROVOX/TRIBUNE – Le président et le directeur général de SOS Chrétiens d’Orient s’inquiètent pour l’avenir de la population chrétienne sommée de quitter la région suite à l’accord de cessez-le-feu entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan.

L’Arménie fut la première nation se convertissant au christianisme. En Cilicie, un brillant royaume arménien a éclos avec des liens forts avec la France et les États latins d’Orient et dont le dernier roi Lévon VI de Lusignan mourra en exil à Paris et aura son gisant dans la basilique de Saint-Denis. L’Arménie a donc des forts liens avec la France et le christianisme dans l’histoire longue.

45 jours. C’est le temps qu’ont résisté les Arméniens, face aux assauts répétés de l’Azerbaïdjan, de la Turquie, des mercenaires djihadistes basés avant en Syrie et transférés par la Turquie et des drones israéliens.

Comment dès lors ne pas penser au magnifique livre de Franz Werfel, Les Quarante Jours de Musa Dagh qui décrit la résistance héroïque des Arméniens du Musa Dagh face au génocide organisé par les Jeunes-Turcs. De même, de quel sombre avenir est porteur la défaite finale de l’Artsakh malgré l’héroïsme de ses défenseurs?

Arménie
Type d'intervention

L’accord de cessez-le-feu

L’Artsakh, avec le soutien arménien, avait réussi à conquérir en 1994 son autodétermination contre la dictature azerbaïdjanaise, à l’issue d’un conflit commencé par les pogroms d’Arméniens à Bakou, Sumgait et Kirobovad orchestrés par les Azerbaïdjanais. Ces derniers n’ayant pas accepté l’autodétermination, les tensions se sont envenimées et ont débouché sur la relance d’un conflit de haute intensité le 27 septembre 2020.

L’accord de cessez-le-feu du 10 novembre prévoit la restitution à l’Azerbaïdjan des territoires entourant l’Artsakh de même que le contrôle par l’Azerbaïdjan des territoires qu’il a envahis en Artsakh. Le corridor de Lachin qui relie l’Artsakh et l’Arménie restera sous contrôle de l’Arménie et une force d’interposition russe sera positionnée dans le Haut-Karabagh dont le statut est incertain tandis que les forces arméniennes se retireront.

Les pays occidentaux ont brillé par leur inaction ou par des condamnations verbales

Les réfugiés pourront revenir. La Russie a joué un rôle pour le moins ambigu en ne soutenant pas l’Arménie et l’Artsakh de même que la politique de la Russie tsariste lors des pogroms anti-Arméniens de 1905 et de la Russie bolchevique qui a laissé l’Artsakh et le Nakhitchevan entre les mains de l’Azerbaïdjan. Les pays occidentaux ont brillé par leur inaction ou par des condamnations verbales.

Que faire?

Tout d’abord cela a montré que les alliances purement géopolitiques restent fragiles. L’Arménie et l’Artsakh ne peuvent compter que sur leurs propres forces. Cela a aussi montré l’importance de la démographie pour l’avenir d’une nation, l’Arménie ayant souffert de son déclin démographique en passant de 3,6 millions d’habitants à 3 millions d’habitants comparé à l’Azerbaïdjan passé de 7 à 10 millions d’habitants.

Pour ceux voulant aider l’Arménie et la liberté d’un peuple chrétien ayant souffert d’un génocide et réclamant son autodétermination sur une partie de ses terres historiques, l’aide doit actuellement être humanitaire pour accueillir les réfugiés, aider la société arménienne à surmonter le choc de la guerre et lutter contre le développement de la pandémie du nouveau coronavirus qui a eu lieu durant la guerre.

Mais l’aide doit aussi être économique pour aider l’Arménie à développer une autonomie militaire et technologique face aux pétrodollars de Bakou. Enfin, l’aide doit être politique pour créer un mouvement de solidarité avec l’Arménie qui soit effectif dans les coups durs. Elle doit voir qui est l’ennemi à savoir la logique expansionniste de la synthèse turcoislamique au pouvoir à Ankara et comment le combattre.

Dans l’immédiat, une solidarité politique devrait s’exercer entre les pays occidentaux pour qu’une pression soit effectuée par ceux-ci sur la Turquie et l’Azerbaïdjan, en ciblant les structures liées à Ankara et les économies turque et azerbaïdjanaise. En effet, plusieurs points doivent être garantis si possible: la possibilité pour l’Artsakh de garder une force d’autodéfense et ne pas être à la merci de l’Azerbaïdjan, la possibilité pour les Arméniens de rester à Shushi sous protection russe avec l’application du droit au retour des réfugiés pour les Arméniens et la protection du patrimoine culturel arménien dans les zones sous occupation azerbaïdjanaise.

Le pire étant à craindre de la dictature raciste et panturquiste d’Aliyev qui a récemment comparé les Arméniens à des chiens.

Les médias et le mouvement de solidarité doivent documenter les éventuelles violations de droits humains après le cessez-le-feu, le pire étant à craindre de la dictature raciste et panturquiste d’Aliyev qui a récemment comparé les Arméniens à des chiens. Il est également nécessaire, et cela semble une évidence, de remettre en question la présence de la Turquie au sein de l’OTAN.

L’Arménie et la population arménienne d’Artsakh ont plus que jamais besoin de notre solidarité d’autant que rien n’est inéluctable historiquement.

Les mauvais jours finiront et le peuple arménien doit pouvoir vivre libre sur ses terres historiques.

Par Charles de Meyer et Benjamin Blanchard

Votre responsablede pôle

Jeanne der Agopian

Directrice de la communication adjointe