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Actualités des missions – Juin 2024

ARMÉNIE

Un club de boxe pour les déplacés d’Artsakh.

En présence du champion de boxe arménien Youri Sakount, Benjamin Blanchard, directeur général de SOS Chrétiens d’Orient, Axel Rokvam, responsable du développement de l’association en Belgique, et Alexandre Goodarzy, chef de mission en Arménie, inaugurent un nouveau club de boxe et de savate française à Erevan, dont la rénovation et l’équipement ont été entièrement financés par les généreux donateurs de SOS Chrétiens d’Orient.
 
Un projet inédit pour les déplacés d’Artsakh qui peuvent désormais trouvés en cette salle un refuge et une opportunité de se reconstruire physiquement et mentalement. La boxe devient une métaphore pour la vie, où chaque coup reçu est une leçon et chaque victoire une preuve de persévérance et de courage.
 
***
« L’art de vivre ressemble plutôt à la lutte qu’à la danse en ce qu’il faut toujours se tenir en garde et d’aplomb contre les coups qui fondent sur nous et à l’improviste. » Marc Aurèle.
 
Boxer … un sport ? un défouloir ? D’aucuns disent que les boxeurs sont des personnes violentes qui ne savent pas se canaliser. Pour en être un moi-même, je dirai au contraire que les meilleurs boxeurs sont ceux qui ont un parfait contrôle d’eux-mêmes et une parfaite maîtrise de leurs émotions. L’on ne boxe pas pour faire mal à son adversaire, l’on boxe d’abord pour soi, pour se dépasser, pour affronter ses épreuves dans un environnement cadré et pour faire de sa vie un hymne à la résilience.
 
A cause de son histoire tumultueuse, l’Arménie a fait de la pratique de la boxe un sport national à l’orée du XX° siècle et si ce n’est qu’en 1956 que les premiers résultats probants tombent grâce à la médaille d’or de Vladimir Yengibaryan aux Jeux Olympiques dans la catégorie des poids super-légers, elle s’est imposée très vite parmi les cinq sports les plus pratiqués dans le pays, aux côtés de la lutte et de l’haltérophilie.
 
Et pour cause, chaque entraînement est une épreuve où l’on repousse ses limites physiques et mentales. Les coups portés sur le ring ne sont pas seulement des défis à la force corporelle, mais des tests de volonté. Affronter un adversaire, c’est avant tout affronter ses propres peurs et doutes. Chaque round est une bataille contre soi-même, où l’on cherche à aller au-delà de ce que l’on croyait possible. C’est dans cette quête de dépassement que l’on découvre des ressources insoupçonnées et que l’on forge un caractère à toute épreuve.
 
Mais la boxe, c’est aussi l’art de se contenir. Sur le ring, la colère, l’impatience et la précipitation sont des ennemis redoutables. Il ne suffit pas de frapper fort ; il faut frapper juste. Cette précision nécessite une maîtrise de soi, une capacité à rester calme et concentré même sous la pression la plus intense. La boxe apprend à canaliser ses émotions, à transformer l’énergie brute en puissance contrôlée. C’est une leçon d’humilité, où l’on apprend que la vraie force réside dans la maîtrise de soi, dans la capacité à rester serein face à l’adversité.
 
C’est dans cette optique de permettre aux déplacés de l’Artsakh de se reconstruire par le sport et le dépassement de soi que SOS Chrétiens d’Orient a rénové un club de boxe à Erevan et soutenu le combat du champion de boxe anglaise Youri Sakount, arménien vainqueur en deux rounds de 3 minutes du boxeur russe Elizbar Djologua le 9 juin dernier.
SYRIE

Au cimetière arménien d'Alep, les volontaires défrichent des tombes laissées aux affres du temps.

Une mer d’herbes hautes sèche sous un océan de ciel profond et azuré, dont aucun nuage n’obstrue la course dangereuse des rayons.
 
Cette mer dissimule en ses entrailles des tombes de pierre oubliées, parfois difficiles à entrevoir. Sur une d’entre elle git un fémur laissé hors de son dernier lit par l’érosion et l’abandon, peut-être un augure morbide ou une facétie du diable.
 
Mais au cœur de ce macabre tableau survient le chant estival des oiseaux et un bruit de mouvement régulier.
Un volontaire, entre deux tombes d’anciens ennemis que les appels des trompettes de l’Apocalypse réveilleront en une amitié nouvelle, arrache la paille jaune de son râteau puis la dépose sur l’amas qui s’est constitué par circonstance des faits. Les broussailles s’empilent, des heures durant, pour grandir cet amas devenu aussi haut qu’un homme.
 
Haletant mais satisfait, ce fervent travailleur s’accoude à son outil pour prendre un repos salutaire. C’est à ce moment que je prends sa place pour le décharger de l’effort sous lequel plient ses épaules depuis plusieurs heures.
 
Je racle à mon tour le sol d’argile rouge. Quelques serpents ou scorpions dégagés par mes coups se dérobent de la lumière pour ramper vers d’autres herbes profondes, me rappelant avant leur fuite que leur venin peut fatalement diluer mon sang à tout moment d’inattention.
 
Averti et alerte, je continue de nettoyer ce cimetière. Je vois cet acte charitable comme un moyen de substituer tous les rendez-vous manqués des familles à leurs défunts, de la même façon qu’on aiderait une personne âgée oubliée de ses petits-enfants. Les difficultés qu’éprouvent certains à faire bonne œuvre rachètent les erreurs des autres. Par des menus sacrifices, la balance humaine est quotidiennement rééquilibrée en faveur de l’Humanité.
 
La relève prise, je m’acquitte de mon devoir pour me promener dans les allées taciturnes. Le chemin de mes pas, inconsciemment guidé jusqu’à un archange de pierre moussue me fait atteindre une chapelle.
 
À son fronton, une attestation de foi en la certitude de la Résurrection est écrite en arabe, arménien puis en français. Effectivement, à l’époque indiquée sur la pierre, la Syrie était sous mandat français qui induisait une protection et un soutien direct aux minorités chrétiennes d’Orient, projet que la France, malgré ses propres périodes troubles et les trahisons au sein de son gouvernement indigne a toujours su faire perdurer jusqu’à la guerre de 2013.
 
Je me recueille en ces lieux. Sons, senteurs et visions rappellent des souvenirs inconnus qui me semblent, paradoxalement, familiers. C’est l’étrange sensation que d’entrer en communion avec la Création.
LIBAN

Journée de jardinage au monastère de Sainte-Thècle.

Les volontaires prêtent main forte au père Najem en débroussaillant le jardin du monastère maronite de Sainte-Thècle, fondé dans les hauteurs du village de Wadi el Chahour.
 
« Au petit matin, conduits par notre chauffeur Assad, nous nous dirigeons à travers les chemins escarpés des montagnes vers le monastère. À notre arrivée, nous sommes chaleureusement accueillis par le père Najem. Nous enfilons nos gants, prenons un bidon d’essence et tirons, tant bien que de mal, la broyeuse jusqu’au champ situé en amont du monastère.
 
Nous retroussons nos manches et commençons notre travail sous la direction bienveillante du père. Nous avons pour mission de broyer des tas de branches d’oliviers et de sapins préalablement coupées par d’anciens volontaires et des scouts. Afin d’optimiser notre efficacité, trois groupes se répartissent le travail : ceux qui, à l’aide d’un sécateur, coupent les grosses branches d’oliviers ; ceux qui mettent les branches dans la broyeuse et les derniers qui s’assurent à l’aide d’un gros bâton que rien ne reste coincé dans la machine.
 
Après une matinée de travail, nous sommes conviés à nous ravitailler autour d’une tablée de mets traditionnels préparés par la fameuse cuisinière, madame Leila. On nous avait déjà passé le mot que nous allions nous régaler au monastère. Sans surprise, ce fût le cas !
 
Après avoir repris des forces, nous prenons la route durant une demi-heure vers une petite source pour remplir les bidons d’eau qui serviront au monastère. Ce ravitaillement nous fait prendre conscience combien il est important de ne pas gaspiller cette denrée. La question de l’accès et à l’usage de l’eau est permanente au Liban.
 
De retour au monastère, nous nous dirigeons vers le jardin. Passionné et passionnant, le père Najem nous présente son petit coin de paradis. Grand érudit, il nous explique l’importance de la dévotion au travail manuel, au travail de la terre. C’est un retour aux sources. Et sans aucun doute, après avoir bien nourri l’esprit, il faut bien nourrir le corps ! Son jardin est rempli de mille et un fruits qu’il nous fait goûter.
 
C’est avec attention que nous mettons en pratique tous ses conseils de jardinage. Les mains terreuses, nous nous appliquons à mettre en pot différentes plantes aromatiques.
 
En fin d’après-midi, le père nous invite à nous rafraîchir avec un bon jus d’orange pressé. C’est sur ce dernier moment de partage que nous finissons cette journée, tous comblés de ce qui nous a été transmis. »
IRAK

Les volontaires assistent au grand festival du vieux Alqosh.

« De bon matin, nous nous dirigeons vers Alqosh, un village de la Plaine de Ninive. Plus nous approchons, plus nous entendons un brouhaha général, qui dénote du calme habituel de la ville.
 
En effet, il y a de quoi faire du bruit ! Presque tous les prêtres d’Alqosh sont là, sans parler de Monseigneur Thabet, évêque chaldéen de Duhok.
 
Les habitants gravitent autour d’eux, vêtus, pour la plupart, de leurs habits traditionnels, et tous bavardent joyeusement. Les prêtres font un petit discours au micro, avant de rejoindre une grande procession, à travers les vieilles rues, rythmée de chants religieux.
 
La foule me bouscule tout en chantant de tout son cœur. Les stands de parts et d’autres des ruelles s’agitent. Il y a de la nourriture, du thé, des vêtements, des bougies religieuses, des spécialités irakiennes ; des femmes cuisent du pain dans un four traditionnel… Je ne sais plus où donner de la tête. Un petit orchestre comprenant une guitare, un tambour et des flûtes entonnent joyeusement des airs locaux.
 
Je croise un homme dont j’ignore le nom, qui me parle en anglais. Il m’incite à le suivre pour que je prenne un peu de hauteur pour profiter de l’événement sans être bousculée sans cesse.
 
Les assiettes sont distribuées, le son de la musique est monté alors que les hommes se mettent déjà en ligne pour le dabké, danse traditionnelle irakienne.
 
Je suis émerveillée de cette culture et de cette joie chrétienne. Mais d’autres choses nous attendent, nous devons quitter la fête. Lentement, nous remontons les ruelles afin de reprendre la route vers la maison. »
EGYPTE

Au bidonville du 15 mai, les volontaires poursuivent les travaux de déblaiement de l’hôpital en construction.

« Passe-moi la pioche, je vais enlever cette grosse pierre qui bloque !», lance Hugues à Nicodème. Nous nous retrouvons à quatre ou cinq dans un petit espace où sera installé prochainement l’ascenseur de l’hôpital, et il nous faut déblayer, ôter les pierres, la terre et les déchets divers accumulés ici depuis longtemps. La poussière nous étouffe autant que la chaleur, et nous devenons rapidement transpirant et noirs de poussière. « Tiens, regarde Alya, tu as pris un coup de vieux, tes cheveux sont devenus blancs !»

Cela fait plusieurs mois que nous nous acharnons sur cet immense tas de débris, et nous en voyons bientôt la fin, cela nous redonne du courage. Les allers-retours avec la brouette remplie se succèdent, et les enfants du bidonville nous suivent en courant, espérant pouvoir faire un petit tour de brouette une fois qu’elle sera vidée.

De temps en temps il faut arroser le sol avec de l’eau car autrement nous respirons la poussière à plein poumons ! Sous la terre, on retrouve de vieilles imprimantes, des chaises, beaucoup d’objets insoupçonnés ! Plus que deux brouettes, puis une, et c’est fini ! Nous sommes si fiers d’avoir enfin terminé ce gros travail !

Il n’y a plus qu’à débarrasser le rez-de-chaussée d’une gazinière et d’une imposante machine à falafel, en les montant dans un camion par un ingénieux système à base de planches de bois.

Depuis la remorque, la pauvreté du bidonville nous saute aux yeux. Des jeunes femmes trient les déchets dans leur maison, fabriquée à base de bois et de tissu, des chiens fouillent les détritus, un cadavre de vache sèche sur une montagne de déchets. »