« Ce samedi s’annonce trépidant et intense. Après avoir enchaîné deux garderies nous filons au centre Salam grâce aux fidèles tuk tuk qui peuvent se faufiler dans les ruelles étroites du bidonville, là où les voitures, elles, n’ont pas leur place.
Nous retrouvons les veuves qui nous attendent fermement, certaines ont des sourires espiègles, tandis que d’autres sont simplement excitées de nous retrouver.
En Egypte, la mort du mari entraîne souvent une perte de statut social pour les veuves. Considérées comme vulnérables et parfois marginalisées, elles sont souvent perçues comme un fardeau, surtout si elles n’ont pas d’enfants ou de soutien familial. La solitude et l’isolement sont fréquents, exacerbés par des normes sociales qui les écartent de la vie publique et des cercles familiaux étendus. Souvent, elles font face à des pressions pour ne pas se remarier, par crainte de briser l’image de fidélité au défunt. En l’absence de ressources financières ou d’héritage suffisant, leur survie dépend souvent de la charité de l’Église et de la communauté.
La sortie au parc que nous leur avons préparée est donc une occasion pour elles de se retrouver et de s’amuser dans un cadre différent de leur quotidien morose.
Nous prenons la direction du parc situé dans le fameux quartier d’Hélipolis, à quarante minutes de là où nous nous trouvons. Le soleil scintille au travers des vitres poussiéreuses du bus. Entre les routes cabossées du Caire qui donnent lieu à de nombreuses secousses en nous procurant parfois quelques frayeurs, nous avalons de délicieux sandwichs préparés le matin même.
En essayant de trouver un coin du parc avec assez de bancs et d’ombre, les traducteurs nous rejoignent afin de nous prêter main forte dans cet après-midi qui s’annonce joyeux et rythmé. Nous lançons la musique et commençons un vrai moment de partage. La danse nous rassemble, au son de musiques arabes, certaines nous apprennent des mouvements de leur enfance, d’autres tapent dans leurs mains en cadence pour exprimer leur enthousiasme.
En gonflant des ballons pour la prochaine activité, nous nous amusons à voir le sourire qui trône sur leurs visages. Chacune vient chercher son dû et l’accroche à son pied afin de pouvoir écraser celui des autres. Un tourbillon de personnes qui courent, de ballons qui éclatent et d’éclat de rire s’élance.
Le temps de se dire au revoir approche, car nous ne pouvons rester éternellement, mais quelle grâce de voir ces visages émus, souriant et joyeux. Quelques-unes lancent des prières afin de nous remercier, ce qui nous touche en plein cœur. «
Dans la région syrienne d’Idlib, les édifices publics portent les traces laissées par treize années de guerre. La visite de terrain menée par une équipe d’associations internationales en janvier 2025 met, entre autre, en lumière la dure réalité des écoles de cette région autrefois prospère.
Avec une population actuelle réduite à 2 000 habitants contre 40 000 avant la guerre, Khan Chekhoun témoigne de l’exode massif provoqué par les combats. Trois écoles principales, Ahmad Taan, Ahmad Yousef et Farouk Al-Kanj, sont fermées depuis 2015. L’une d’elles a été lourdement endommagée par un bombardement aérien après la libération d’Alep. L’école Hetin, autrefois un quartier général militaire, reste inutilisable malgré ses 28 classes.
Habbit, autrefois un village de 3 000 habitants, n’abrite aujourd’hui que trois familles. Les puits qui fournissaient de l’eau à plus de 15 000 personnes sont inutilisables, leurs pompes ayant été volées. Les deux écoles du village restent fermées.
À Maaret Tehermeh, le contraste est saisissant. Ce village, qui a vu sa population tripler à cause des déplacements internes pendant la guerre, ne compte plus que 50 familles aujourd’hui. Parmi ses six écoles hors service, deux se distinguent : l’école moderne pour filles et l’école rurale. Avec une capacité totale de 1 000 élèves, leur réhabilitation représente une priorité pour redonner espoir aux habitants.
Bien que le système éducatif ait été réorganisé et que les baccalauréats d’Idlib soient désormais reconnus dans plusieurs pays européens ainsi qu’au Qatar, les infrastructures demeurent un enjeu majeur. Deux écoles, l’une destinée aux filles et l’autre aux garçons, illustrent cette dualité : des installations modernes mais fragilisées par des frappes aériennes.
Les récits recueillis lors de cette visite reflètent la lutte quotidienne des habitants pour restaurer un semblant de normalité. Les défis sont immenses, mais les initiatives locales et internationales apportent une lueur d’espoir pour ces enfants qui aspirent à retrouver leur place sur les bancs d’école.
Les priorités sont claires : réhabiliter les écoles, rétablir les infrastructures de base et offrir aux enfants un cadre sûr pour apprendre. Ce combat pour l’éducation est une bataille pour l’avenir de toute une génération.