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L’angoisse de voir la Syrie sombrer dans le chaos.

Chers amis,

J’ai décidé de vous écrire pour vous donner des nouvelles des chrétiens de Syrie.

Comme vous le savez, depuis la prise de pouvoir des islamistes du groupe Hayat Tahir al-Cham (HTC), l’avenir de la Syrie s’écrit avec un point d’interrogation et beaucoup d’inquiétude. Trois mois après l’instauration du nouveau gouvernement, personne ne sait encore comment sera la Syrie de demain. 

Vers une islamisation de la société syrienne ?

Bien sûr, les Syriens entendent qu’Ahmed al-Sharaa « al-Joulani », le nouveau « président par intérim » du pays, multiplie les déclarations rassurantes à l’égard des minorités religieuses. Ils prennent acte que le nouveau régime ne s’est pas lancé dans une répression systématique à l’égard des chrétiens : ainsi, plusieurs mois après la révolution, les églises n’ont pas été fermées et les messes continuent d’être célébrées dans le pays. Mais, dans le même temps, la population observe d’inquiétants signes d’islamisation de la société.

Dans de nombreuses villes – et jusque dans les quartiers chrétiens – on a vu apparaître sur les murs des affiches expliquant aux femmes comment se vêtir selon les préceptes islamiques les plus rigoureux, c’est-à-dire en cachant leur visage – et non seulement leurs cheveux – derrière un voile… Et celles qui ne s’y conforment pas le font à leurs risques et périls.

De même, à l’université, autrefois laïque et mixte, des groupes exercent des pressions pour séparer garçons et filles. Et cette année, lors du ramadan, l’ensemble des restaurants ont fermé de crainte de subir des représailles. Autre exemple, particulièrement significatif par son caractère tatillon : désormais, des indications précisent, sur les bouteilles d’eau, comment boire selon les préceptes de la loi islamique… 

L’angoisse de voir la Syrie sombrer dans le chaos. 
 

Comme le dit un père de famille chrétien habitant la ville de Homs : « Certains se rassurent en disant que ces initiatives dignes d’une police religieuse islamique ne proviennent pas du gouvernement et je suis disposé à le croire. Mais qu’est-ce que cela change concrètement pour moi, pour ma femme et mes filles, que cela vienne ou non du gouvernement ? Et d’ailleurs, personne ne sait vraiment ce que contrôle vraiment le gouvernement. »

Les craintes de la population résultent en effet aussi du sentiment que la révolution n’a pas tant abouti à un changement à la tête de l’État qu’à une disparition de celui-ci, d’où une angoissante impression que le pays sombre progressivement dans le chaos.

De fait, non seulement le nouveau pouvoir ne contrôle pas l’intégralité du territoire du pays mais, même au sein des zones qu’il contrôle officiellement, la situation est très loin d’être stabilisée partout. Début mars, des combats ont fait plusieurs dizaines de morts dans la ville de Jablé. Et si un calme précaire règne dans le centre d’Alep, un habitant de Lattaquié, témoigne de sa peur, spécialement depuis le terrible massacre des Alaouites qui s’est déroulé entre le 6 et le 9 mars 2025 dans les villages à majorité alaouites de la côte syrienne  : « Les routes sont constellées de points de contrôle mais personne ne sait vraiment qui les tient – des forces gouvernementales, des groupes armés autonomes ou encore des brigands ? – ni ce que ces hommes exigeront de nous… Le danger est partout. »

D’autres témoignages font état d’exécutions sommaires, de règlements de compte, d’enlèvements ou encore de rackets de commerces chrétiens. Et ici encore, personne ne peut dire s’il s’agit de crimes politiques ou crapuleux. Une seule chose est sûre : dans de nombreuses portions du territoire, et jusque dans les quartiers chrétiens, la peur règne.

Notre devoir : soutenir les populations chrétiennes dans le désarroi.

Dans ces circonstances dramatiques et ces bouleversements chaotiques, la mission de SOS Chrétiens d’Orient ne change pas :

Nous nous tenons aux côtés des populations chrétiennes de Syrie pour leur apporter aide, soutien et réconfort.

Nous étions avec les Syriens dans la guerre lorsqu’ils subissaient les assauts de l’organisation État islamique. Et nous étions également à leurs côtés lorsque les sanctions économiques occidentales iniques ont été prises à leur encontre. Nous sommes encore aujourd’hui avec eux, alors que ces sanctions ne sont toujours pas levées. Ce n’est pas maintenant que nous allons flancher et les abandonner à leur sort.

Nous voulons prouver que nous sommes toujours avec eux et même redoubler d’ardeur et d’initiatives pour les soutenir et les réconforter. Mais, pour cela, nous avons besoin de votre aide.

AIDEZ-NOUS À POURSUIVRE NOTRE PROGRAMME DE « SOUTIEN AUX BÉBÉS D’ALEP »

Depuis 2017, SOS Chrétiens d’Orient soutient les familles chrétiennes d’Alep accueillant des naissances. Concrètement, ces familles pauvres reçoivent une petite allocation à la naissance de l’enfant puis chaque mois jusqu’à son cinquième anniversaire.

Ce dispositif, créé et piloté en lien avec l’archidiocèse grec melkite catholique d’Alep, a pour objectif de soutenir les familles chrétiennes de cette ville plusieurs fois martyre, très durement éprouvée par la guerre avec les combattants jihadistes, puis par le terrible tremblement de terre de 2023.

Cette allocation mensuelle de 12 euros par enfant peut sembler modeste mais, dans un pays frappé par une très grave crise économique, elle est d’un très grand secours pour les familles qui, sinon, auraient les plus grandes difficultés à subvenir aux besoins de leurs enfants.

De plus, comme nous le disait Monseigneur Georges Masri, archevêque grec melkite catholique d’Alep, « au-delà du soutien matériel réel, cette allocation représente aussi un magnifique témoignage d’amitié, de fraternité et de confiance dont les chrétiens de Syrie ont un besoin vital ».

En effet, ces dons leur rappellent qu’ils ne sont pas seuls et cela les aide à surmonter les inévitables moments de découragement qu’ils peuvent ressentir face aux terribles épreuves qu’ils traversent.

Dans les circonstances actuelles, pleines d’incertitudes et de doutes, il n’est pas imaginable d’interrompre le versement de cette aide. Dans le terrible malheur qui les frappe et l’angoisse qui les étreint, les chrétiens de Syrie doivent savoir qu’ils ne sont pas abandonnés.

Je sais pouvoir compter sur vous et je vous en remercie du fond du cœur.

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Benjamin Blanchard
Directeur général de SOS Chrétiens d’Orient