face aux exactions de l'Azerbaïdjan»
Un an après l’invasion du Haut-Karabagh par l’Azerbaïdjan, l’Arménie doit plus que jamais être soutenue sur le plan international pour résister aux pressions de ses voisins belliqueux.
On se souvient qu’il y a tout juste un an, le 27 septembre 2020, les troupes azerbaïdjanaises attaquaient le Haut-Karabagh avec le soutien des forces turques et de mercenaires djihadistes syriens aux ordres d’Ankara.
Cette région, également appelée Artsakh, est un territoire historiquement arménien, qui, en 1994, avait arraché son indépendance à l’Azerbaïdjan, à l’issue d’un conflit sanglant. Bakou n’ayant jamais accepté le droit de l’Artsakh à disposer de lui-même, la guerre s’était enlisée dès le mitant des années 1990 et avait rejoint la longue liste des « conflits gelés ». Chaque année, le contentieux entre les deux protagonistes coûtait la vie à plusieurs soldats de part et d’autre de la frontière.
Le brutal réveil du conflit et l’occupation illégale d’une partie de l’Artsakh par l’Azerbaïdjan a coûté la vie à approximativement 5 000 personnes et provoqué une grave crise régionale et internationale. Cette occupation arbitraire, accompagnée d’exactions contre les civils en raison de leur ethnie et de leur religion, met l’Europe devant ses contradictions et son impuissance diplomatique. Peut-on sans cesse prôner le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, brandir les valeurs humanistes et la lutte contre les discriminations, tout en laissant un voisin se faire étrangler devant sa porte ? Poser la question, c’est y répondre.
Depuis la signature du cessez-le-feu imposé par la Russie à l’Azerbaïdjan, le 9 novembre 2020, alors que l’Artsakh est amputé d’une grande partie de son territoire, les nouvelles les plus inquiétantes parviennent des territoires occupés. Le patrimoine culturel arménien est régulièrement vandalisé, notamment les églises et les cimetières. La population est en proie à des brimades. L’Azerbaïdjan, qui contrôle les sources d’eau avoisinantes, tente d’assoiffer Stepanakert, la capitale de l’Artsakh. Sans oublier que les prisonniers de guerre arméniens sont toujours illégalement retenus par Bakou, au mépris des conventions de Genève du droit de la guerre et de l’accord de cessez-le-feu.
Ce n’est pas tout. A l’extérieur de l’Artsakh, les Arméniens des zones frontalières de l’Azerbaïdjan sont soumis à de multiples incursions de soldats azerbaïdjanais visant à les faire fuir. Le gouvernement d’Ilhan Aliev affiche même son intention d’annexer d’autres provinces arméniennes. Régulièrement, des soldats arméniens meurent à la suite de tirs de l’armée azerbaidjanaise qui violent le cessez-le-feu.
Cette agression inique et disproportionnée revêt une résonance particulière. Alors que la Turquie nie toujours le génocide de 1915, Ankara et Bakou laissent de nouveau entendre la menace d’une lutte à mort contre les Arméniens.
L’occupation des terres artsakhiotes par l’Azerbaïdjan rappelle douloureusement l’annexion illégale – en 1975 – de la moitié de Chypre par la Turquie. Pour faire à ces périls, les Arméniens de l’Artsakh non occupé sont totalement démunis. Pour pallier l’inaction diplomatique, seules la Russie et quelques ONG sont présentes sur place afin de soulager les souffrances.
Dès septembre 2020, SOS Chrétiens d’Orient a ouvert un bureau permanent en Arménie et lancé plusieurs projets d’action humanitaire : aide d’urgence ; reconstruction ou rénovation de maisons, d’églises ou de routes détruites par la guerre ; travaux d’irrigation et plantation d’arbres ; aide au développement économique par l’élevage et l’agriculture. Ces actions limitées mais concrètes permettent à la population arménienne de rester sur ses terres et de lui assurer un revenu pour vivre.
Mais l’urgence est grande : il faut encore reconstruire beaucoup de bâtiments détruits ; la pauvreté croît avec l’accueil des réfugiés venus des terres envahies de l’Artsakh ; les blessés de guerre doivent bénéficier d’une rééducation physique et d’une réinsertion professionnelle ; les traumatismes liés au conflit sont toujours présents dans les esprits.
Bien sûr, l’action en faveur de l’Arménie passe par l’humanitaire, pour panser les plaies encore à vif du conflit, comme pour permettre le maintien sur le long terme de la population arménienne.
Mais l’action doit également être politique et diplomatique. En lien avec la Russie, une action assumée et conjointe des pays européens est nécessaire pour ne pas abandonner l’Arménie face à l’expansionnisme turco-azerbaïdjanais. Au-delà du secours naturel porté à un pays ami, il en va des principes diplomatiques revendiqués.
Tribune de Benjamin Blanchard