Mossoul est une cité bien lointaine pour les Français que nous sommes. Deuxième ville d’Irak, elle est le centre de la plaine de Ninive, dont les effluves parfument nos mémoires de passages bibliques ou littéraires. Plus certainement, les lecteurs de Politique Magazine souffrent encore des terribles images du calife barbare de l’Organisation État islamique annonçant sa domination sur la ville, devenue sa capitale après la défaite de l’armée irakienne, en juin 2014.
Ils ont gardé en mémoire l’application de la lettre Nūn sur les maisons chrétiennes, provoquant l’exode de près de 10 000 personnes, bientôt repoussées encore vers le Kurdistan irakien en raison de l’avancée des djihadistes.
Finalement libérée après une sanglante bataille en juillet 2017, Mossoul est demeurée une cité complexe, pleine de sa longue histoire et de ses blessures. Malgré l’effort de quelques clercs, bien des chrétiens craignent encore d’y revenir, rendus légitimement dubitatifs par les compromissions d’une partie de leur voisinage. Qui se souvient encore de la stupeur occidentale devant la découverte du corps de Mgr Paulos Faraj Rahho, archevêque chaldéen de Mossoul, retrouvé mort, assassiné par ses ravisseurs, le jeudi 13 mars 2008 ? Et ce n’était pourtant pas le premier enlèvement d’évêque dans la ville.
Après bien des communications occidentales sur le retour du vivre-ensemble dans le chef-lieu de la plaine de Ninive, espérer le renouvellement de la présence chrétienne dans les rues exige une foi vivace.
C’est pourtant le pari des équipes de SOS chrétiens d’Orient qui ont soutenu depuis 2022 les travaux de réhabilitation de l’église Notre-Dame-du-Perpétuel-Secours dans la ville. Une importante délégation de notre association était présente lors de sa re-consécration le 5 avril dernier. Contre toute désespérance, l’association a intégralement financé les travaux pour soigner l’édifice des horribles cicatrices du passage de la barbarie sur cette église. Absent, je n’ai pas manqué de trembler d’émotion en constatant le résultat des travaux dont les étapes photographiques sont édifiantes.
Les chrétiens d’Irak ne renoncent pas à leur mission historique
Encore une fois, toute la communauté des soutiens de SOS chrétiens d’Orient aura prouvé la fidélité de notre pays pour les chrétientés orientales, malgré l’adversité et la haine. Comme un symbole de la maturité de notre association, la cérémonie du 5 avril constituait l’aboutissement du projet le plus coûteux de notre histoire. C’est désormais notre activisme en faveur du retour des chrétiens dans Mossoul qui mérite un surcroît d’investissement. Pour une large part, nous n’y pourrons que peu de choses, tant les préventions sont grandes pour certaines familles chrétiennes de renouer avec ces rues, témoins du triomphe du djihadisme. Mais la mobilisation ecclésiale, à l’image édifiante du pasteur de l’église chaldéenne de Mossoul, Mgr Najeeb, nous prouve que les chrétiens d’Irak ne renoncent pas à leur mission historique, sise sur la terre de leurs pères. Elle nous engage à l’attention et à la constance dans l’amour que nous devons porter à ces frères lointains, pour que le martyre de l’oubli ne succède pas à celui du sang.
Alors que le patriarche chaldéen a pu faire son retour à Bagdad après un intolérable exil, SOS chrétiens d’Orient continue ses actions en Irak, afin que Notre-Dame du Perpétuel Secours et ses ouailles continuent de constater que la France ne les abandonne pas.