Le skipper montpelliérain Jean-Marie Vidal porte ce projet qui part ce dimanche 16 juin de Marseille.
« Ce n’est pas une course. C’est un ralliement et une cause. »
Au milieu des voiliers qui patientent dans le Vieux-Port marseillais, bercés par le souffle chaud du sirocco, Jean-Marie Vidal s’affaire. Son téléphone ne cesse de sonner et les navigateurs qui l’accompagnent pour cette Route du Liban, dont le départ est donné ce dimanche, le sollicitent de toutes parts. Sur le matériel de sécurité. Ou sur la messe donnée ce samedi en l’honneur de l’armada.« Vous ne pouvez pas venir ? Je le dirai à saint Pierre », se marre le marin montpelliérain, double vainqueur de la solitaire du Figaro. Avant de redevenir sérieux, sur Moria, son voilier avec lequel il va parcourir les 3 000 km de l’expédition humanitaire en faveur des minorités d’Orient, chrétiennes essentiellement, mais pas seulement.
Le Liban, « la porte d’entrée ».
« Déjà, je ne suis que le relayeur », minimise l’ancien directeur du port de Port-Camargue, taiseux et modeste. Voilà deux ans et demi, des bénévoles de SOS Chrétiens d’Orient voulu alerter sur le sort de ces minorités parfois persécutées. Il est sollicité, « il en prend la barre » et le comité de pilotage a tranché pour une flottille vers le Liban.
Dessins, dons et bonbons.
Les navires partent ce dimanche de Marseille après la messe de bénédiction donnée samedi par le père Luc Giran.
Ils vont rallier le port de Jounieh, près de Beyrouth, le 10 juillet après avoir fait des escales à Bonifacio, Lipari (dans les îles éoliennes), puis Kalamata (en Grèce), Agios Nikolaos en Crète et Latci en Chypre. Ils partent chargés de matériel (lait en poudre, grisettes de Montpellier, bonbons, livres…) qu’ils vont donner à trois associations chrétiennes engagées au Moyen-Orient : Aide à l’église en détresse (un soutien alimentaire aux réfugiés syriens dans la vallée de la Bekaa, au Liban), SOS Chrétiens d’Orient (construction d’un foyer pour la jeunesse), Portes ouvertes France (aide matérielle aux victimes du conflit syrien).
Près de 100 000 € ont par ailleurs été récolés et 1 000 dessins d’enfants de France seront donnés à leurs homologues sur place.
« L’idée, c’est d’informer, sensibiliser, mobiliser. On ne dit pas assez que les Coptes, on les met dans les églises et on met le feu, que les Chaldéens, on les décapite, etc. On va au Liban parce que c’est la porte d’entrée, un pays où les confessions vivent ensemble, chrétiens maronites et musulmans chiites ou sunnites, détaille-t-il. Le mot chrétien est parfois associé à l’intégrisme et à l’ultradroite, je ne suis ni l’un ni l’autre ! Et nous voulons de l’ouverture, yézidis ou Druzes sont aussi aidés. »
Dans les allées du port, Jean-Marie Vidal, distribue un savon d’Alep, distille un conseil et se demande comment la flottille va se comporter pendant presque un mois, mais rassuré par la double motivation des 140 navigateurs : la cause et la destination.
Une armada de 32 navires.
Jean-Marie Vidal, coordinateur de cette première Route du Liban, a dû limiter le nombre des participants face à l’engouement. Ils sont quand même 28 à partir ce dimanche matin de Marseille et quatre autres voiliers les rejoindront en route, depuis la Grèce ou la Turquie, soit 32 voiliers pour 140 marins. Venus d’Occitanie, Paca, Corse, Barcelone ou Concarneau.
Sur le Vieux-Port, Bernard, Toulonnais de 72 ans, peaufine les derniers préparatifs. « C’est avant tout la cause qui me motive, lance le retraité, ancien prothésiste dentaire, qui a déjà donné dans l’humanitaire en Inde, comme enseignant. Et je suis aussi attiré par la balade. »
Patrick, ancien prof de math et informaticien de 67 ans, l’accompagne, après avoir découvert cette initiative en cherchant des coéquipiers de navigation. Son bateau est au Cap-d’Agde, mais il habite à Istanbul : « Je suis sensibilisé à la question des chrétiens d’Orient et des chrétiens syriaques pour qui c’est dur en Turquie, c’est une belle cause. »
YANICK PHILIPPONNAT