en tournée dans toute la France
114 enfants chrétiens de la chorale Cœur-Joie venus de Damas sont actuellement en tournée en France. Leur objectif ? Partager le patrimoine culturel syrien et œuvrer à la solidarité envers les Chrétiens d’Orient.
Samedi 12 mars, 20h30. L’église Notre-Dame-des-Champs, dans le sixième arrondissement de Paris, est pleine à craquer. Des gens font la queue dehors depuis deux heures pour assister au concert. 114 enfants, âgés de 8 à 16 ans, venus de Damas, donnent leur premier récital en France. Le début d’une tournée qui durera jusqu’au 27 mars. Dans l’église austère, les jeunes chrétiens syriens allument le feu par leur joie de vivre. Ils dansent presque en chantant, dodelinant leurs têtes sur les rythmes orientaux. L’écrasante majorité du choeur est composée de filles, aux longs cheveux bruns détachés. Ils entonnent des chants typiques de leur pays, mais aussi des chansons populaires françaises, comme «Vois sur ton chemin» ou «S’il suffisait d’aimer» de Jean-Jacques Goldman.
Des youyous fusent dans la salle, où de nombreux syriens réfugiés à Paris sont venus écouter leurs compatriotes. Parfois, l’émotion étreint le public. Lorsqu’ils interprètent « J’ai peur pour mes enfants », un chant élégiaque composé par Ziad Boutros, plusieurs enfants ont les larmes aux yeux et une jeune adolescente quitte le chœur en sanglots. C’est que beaucoup de jeunes ont perdu des proches dans la guerre qui ravage le pays depuis cinq ans. La chorale répétait à proximité d’un quartier de Damas tenu par les rebelles. Cinq enfants de la chorale sont morts depuis le début du conflit.
Le Père Elias Zahlaoui, curé de la paroisse Notre-Dame de Damas, qui a fondé cette chorale il y a 38 ans, prend la parole, dans un français parfait, au début du concert. «La plupart des musiciens qui nous accompagnent sont musulmans, précise-t-il. Cela signifie qu’en Syrie, chrétiens et musulmans, avons vécu et pouvons vivre côte à côte». «La priorité de la chorale est de donner un message chrétien, humain et universel, explique de son côté la chef de chœur Claudia Tourna. Nous interprétons des chants de notre patrimoine religieux et culturel, de Syrie, du Liban, d’Égypte, d’Irak, qui puissent constituer des ponts spirituels et culturels entre les différentes composantes humaines et religieuses, de la société arabe. » La chorale se veut œcuménique, les enfants venant de différentes traditions des Églises orientales : melkites, maronites, arméniens catholiques, syriaques orthodoxes, etc. La situation des chrétiens en Syrie est délicate depuis le début du conflit. Protégés par le régime, ils sont encore nombreux à Damas. Mais nombre d’entre eux ont fui les persécutions de l’Etat islamique et se sont réfugiés notamment au Liban.
La venue de Cœur-Joie en France a été organisée par SOS-Chrétiens d’Orient, une association crée en 2013, pour venir en aide aux chrétiens d’Irak et de Syrie. « Nous organisons des missions en Syrie depuis décembre 2013, explique Benjamin Blanchard, le président de l’association. Nous travaillons avec les églises catholiques locales et avons ainsi rencontré le père Zahlaoui et sa chorale. Lui permettre de venir en France, c’est signifier aux chrétiens d’Orient qu’on ne les oublie pas et que leur persévérance, notamment à travers la pratique de la musique, n’est pas vaine. Ils ont un témoignage et un trésor musical à partager. »
Les bénéfices de la tournée seront reversés à l’aide aux chrétiens syriens. A Paris, une centaine d’enfants ont dû être logés dans un Formule 1, mais la plupart du temps, les choristes seront accueillis dans des familles, ou logés par les diocèses ou municipalités. Lors de leur tournée, ils feront quelques détours touristiques: ils ont déjà visité Paris en bateau-mouche, un site gallo-romain à Lyon, iront au sanctuaire de Lourdes et au théâtre antique d’Orange. A Béziers, la ville a pris en charge l’intégralité de leur séjour, logements et repas. Les enfants seront à Bollène le 15 mars, le 18 à Béziers, le 19 à Toulouse et le 21 à Lourdes. Ils termineront leur tournée par un concert à la mairie du 7ème, sur invitation de Rachida Dati, lors du Vendredi saint.
Un article de Eugénie Bastié